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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 8.djvu/518

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Italienne, la première représentation du Cabriolet volant, ou Arlequin-Mahomet, comédie italienne en quatre actes. On a dit c’est M. Cailhava d’Estandoux, Gascon connu par plusieurs chefs-d’œuvre qu’il a fournis à la scène française en ces derniers temps, qui a donné le canevas et même quelques scènes écrites de cette pièce. D’autres disent que le fonds en est pris dans l’ancien théâtre italien, et que le Gascon l’a enrichi seulement de quelques scènes. Je ne suis pas assez savant pour dire quelle est de ces deux versions la génuine. Ce qu’il y a de certain, c’est que cette pauvreté a eu assez de succès : on s’y est beaucoup moqué de Beverley et de Silvain, et cela a amusé. Arlequin bardé d’assignations, poursuivi par ses créanciers, s’abandonnant à son désespoir, veut se donner la mort à force d’indigestions : c’est le genre de mort qu’il choisit. Il aperçoit son chat qui dort, il fait sur lui à peu près les réflexions que Beverley fait sur son fils, et veut le tuer ; heureusement le chat se réveille à propos, égratigne son maître inquiet, attendri sur son sort à venir, et se sauve d’un bond. Les reconnaissances de Silvain sont parodiées avec la même gaieté.

— Depuis l’Art de coiffer les dames, publié par l’immortel M. Le Gros[1], il ne s’est rien imprimé d’aussi important que la Pogonotomie de M. Perrel[2]. Ce patriote respectable est justement surpris que, dans cette foule innombrable de productions qui honorent la littérature de l’univers, il ne se trouve pas une brochure qui enseigne à l’homme les principes pour commencer dans sa jeunesse une opération qu’il est obligé par la suite de répéter plusieurs fois la semaine. Hélas ! c’est que l’esprit humain est encore dans son enfance. Cette gloire d’apprendre à l’homme civilisé à se raser était réservée de toute éternité à M. Perrel. Plût à Dieu que ce grand homme eût paru une quarantaine d’années plus tôt ! Je donnerais la moitié de ma barbe pour savoir raser l’autre. Il est très-humiliant pour tout homme qui se ressent un peu de la dignité de la nature humaine de se laisser prendre par le nez à tout moment. M. Perrel nous assure que c’est en tremblant qu’il entre dans la carrière : cela ne vaudrait pas le diable pour enseigner l’art de raser ; mais je suis

  1. Voir tome VI, p. 471.
  2. La Pogonotomie, ou l’art d’apprendre à se raser soi-même, par J.-J. Perrel, maître et marchand coutelier. Brochure in-12.