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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 9.djvu/206

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la pompe provençale dans son style. Il se plaint du cardinal de Fleury, qui lui refusa la moitié de la pension de son père, et répondit aux sollicitations que les services militaires du père n’étaient pas un titre pour que le roi payât les talents poétiques du fils. Cette réponse paraît d’abord un peu dure ; cependant le cardinal, parcimonieux des trésors de l’État, ne voulait dire autre chose, sinon qu’il aimait mieux faire ce refus qu’imposer un vingtième, second vingtième, troisième vingtième, vingtième vingtième sur le peuple. Le cardinal avait devant les yeux le conseil que Montesquieu n’avait pas encore donné aux rois, de songer quelquefois que les courtisans jouissent de leurs grâces, et les peuples de leurs refus. En effet, supposons que le père de M. Pyrrhys ait sauvé la France trois ou quatre fois, en sa qualité de lieutenant d’infanterie, et qu’il se soit retiré du service avec le grade de capitaine et pension de retraite ; la France a trop de sauveurs de cette espèce, et ne serait pas assez riche s’il fallait qu’elle récompensât ces services de génération en génération ; c’était là, du moins, le système du cardinal de Fleury. Mais qu’est-ce que tout cela fait à la Pologne ? Ce que cela lui fait ? C’est qu’elle a eu l’avantage, grâce au refus du cardinal, d’enlever M. Pyrrhys à la France. Il s’est fait gouverneur d’un prince Sangusko, pour l’instruction duquel il a composé les lettres qui forment ce recueil. La première traite des diètes de convocation ; la seconde, de l’élection des rois de Pologne ; la troisième, de l’élection d’Auguste II, électeur de Saxe, à la fin du siècle dernier, et de celle de son fils Auguste III ; enfin de celle du roi d’aujourd’hui. Elle est terminée par des réflexions politiques sur l’état de la Pologne, faites au commencement de 1764, et par conséquent de peu d’usage à la fin de 1770.

M. Linguet, qui n’a pas peur, qui fait même parade du nombre, de la force et de la qualité de ses ennemis, a publié depuis deux ou trois mois des Lettres sur la théorie des lois civiles, où l’on examine entre autres choses s’il est bien vrai que les Anglais soient libres, et que les Français doivent ou imiter leurs opérations, ou porter envie à leur gouvernement ; brochure in-12 de deux cent soixante-douze pages. L’auteur y défend ses paradoxes favoris, savoir, que le président de Montesquieu n’avait pas le sens commun ; qu’il n’y a d’heureux que les peuples d’Asie qui vivent sous le despotisme si décrié,