Aller au contenu

Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 9.djvu/290

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Des champs élysiens quel charme me rappelle,
Et me force à revoir le séjour des humains ?
Quel mortel fait briller d’une beauté nouvelle
Ces bosquets fortunés que plantèrent mes mains ?
Si j’en crois ses discours et ses grâces touchantes,
C’est un prince élevé dans la cour de Louis ;
Mais du bandeau des rois les traces imposantes
Attachent sur son front mes regards éblouis ;
C’est Gustave… À ce nom soudain mon cœur s’enflamme.
Héros victorieux qu’à la fleur de tes ans
Lutzen vit expirer sous tes lauriers sanglants,
Éveille-toi ! ce jour doit plaire à ta grande âme.
De puissants intérêts nous unirent tous deux :
Viens contempler, assis auprès de mes neveux,
Le digne possesseur de ton vaste héritage,
Et vois la majesté sourire à leur hommage.
Fidèles à leur maître, ardents à le servir,
Leur bras sait le défendre, et leur cœur le chérir ;
À son autorité soumis dès leur naissance,
Ils ont appris de moi que de la soutenir
Dépendent le bonheur, la gloire de la France.
Ô prince que bientôt nos murs ne verront plus,
Un trône vous attend, jouissez-en d’avance ;
Vous ne régnerez point sur des peuples vaincus :
Fidélité, respect, amour, obéissance,
Vous avez tout acquis à force de vertus !
Mais avant de combler leur plus chère espérance,
Daignez les écouter ; ils empruntent ma voix ;
Ma bouche, accoutumée à parler à des rois,
Ne fit jamais entendre un langage timide :
Avec Louis uni par un lien solide,
À de jaloux rivaux vous dicterez des lois ;
La France avec transport aujourd’hui renouvelle
Cet utile traité que m’inspira le zèle.
Mon âme sans regret retourne aux sombres bords :
Là, parmi vos aïeux et leurs ombres tranquilles,
Pour charmer les loisirs de tant d’illustres morts,
Je leur peindrai Gustave adoré dans nos villes,
Honorant les beaux-arts, ces enfants de la paix,
Et les peuples du Nord célébrant ses bienfaits.

— J’ai eu l’honneur de vous parler des faits et gestes de M. Sumarokoff, poëte russe ; mais je ne suis pas en état de vous parler de la bonté de ses tragédies, que je ne connais point. La lettre que vous allez lire vous mettra au fait de son goût et de ses idées sur la littérature française.