Page:Cortambert - Impressions d'un japonais en France, 1864.pdf/185

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
EN EUROPE

approche, me tendit la main affectueusement, m’adressa une phrase d’accueil en français très-correct, et m’assura que je n’étais pas un étranger pour lui ; il roula à mon intention une longue cigarette, qu’il m’offrit après l’avoir humectée sur ses lèvres, et moi, bravant certains scrupules, je me mis résolument à marier mes joyeuses bouffées de tabac à celles de mon nouvel ami.

Je ne tardai pas à discerner la brillante intelligence et les nobles qualités du jeune interprète, dont la parole douce et sympathique m’avait tout d’abord charmé. Il s’énonçait avec une clarté parfaite, presque sans accent ; ses yeux, d’un noir brillant, étincelaient de temps à autre, suivant le tour que prenait la conversation.

Il me fut facile de voir que la théologie était sa spécialité de prédilection : il en causait sans prétention, mais avec une sorte d’entraînement irrésistible ; il était là sur un terrain qu’il aimait, — sur un terrain qu’il avait cultivé longtemps et qu’il connaissait à fond : il n’avait pourtant que vingt-cinq ans !

— Vous êtes chrétien catholique ? lui demandai-je.

— Oui, me répondit-il ; les missionnaires de Poulo-Pinang m’ont élevé dans la foi catholique ; j’ai failli même devenir pour toujours leur compagnon ; le sort en a décidé autrement, je suis marié et père de famille.

— Et vous devez toute votre instruction aux missionnaires ?