compatriotes qui nous accompagnent sont mariés et n’ont évidemment pas déboursé une somme aussi forte. Les coulis acquièrent une femme moyennant une douzaine de francs ; mais, vous et moi, nous ne voudrions pas de pareilles compagnes.
— Je le comprends, mais encore ces femmes ont-elles de bonnes mœurs ?
— En général. Ceci dépend de la surveillance.
— Mais, objecta-t-on, l’argent a partout une valeur conventionnelle, et les douze francs de vos Annamites sont peut-être tout aussi pesants en Cochinchine que douze cents francs en Europe.
— Je serais tenté de ne pas le supposer, répondit ingénieusement Pétrus, car un de vos amiraux faisait travailler nos concitoyens à raison de trois francs par jour. Naturellement, on n’a pas dû établir cette base de prix sans y réfléchir mûrement.
— Ainsi, ajoutai-je, un Cochinchinois quelque peu laborieux pendant quatre jours pouvait, au cinquième, prendre femme ?
— C’est la vérité ; ceci s’est vu souvent, me répondit Pétrus, mais plus souvent encore l’ouvrier se grisait avec de l’eau-de-vie ou achetait des armes.