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IV

J’ai rarement vu d’homme plus impartial dans une position cependant plus difficile. Son éducation européenne et sa confraternité avec des Français donnaient à mon ami Pétrus la mesure de la prétendue civilisation de l’Annam ; mais son cœur pouvait-il répudier sa patrie ? Non. — Il louvoyait avec prudence entre ces deux écueils : déprécier l’Europe ou son pays ; — il admirait l’une et aimait l’autre : c’était la meilleure voie qu’il pût suivre.

Son esprit, bien que très-indulgent, se plaisait assez volontiers aux critiques anodines ; il n’égratignait pas, il chatouillait seulement, car sa bonté l’entraînait même parfois à oublier ses intérêts les plus chers.

Je me souviens qu’il s’amusait beaucoup de la crédulité de ses compatriotes, qui avaient pris au sérieux les mille trucs de la grande féerie de Peau-d’Âne et qui en étaient sortis persuadés que des sorciers planaient au-dessus de la salle de la Gaîté. Il me raconta également avec le sourire sur les lèvres la terreur que M. Robin, le prestidigitateur, avait su leur inspirer ; voici l’anecdote :