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— Précisément, répondis-je. Par Bouddha ! je te reconnais aussi !

Un quart d’heure après, Francœur et moi, nous étions d’excellents amis. Comme l’homme le plus modeste est toujours invinciblement entraîné à parler de lui, Francœur me conduisit dans les mille péripéties de son existence et me fit le tableau de toutes ses aventures, depuis son séjour à Nagasaki, où je l’avais connu, jusqu’à Marseille, dont il était devenu citoyen.

Francœur est un de ces hommes qui ont, d’une part, trop d’imagination pour être jamais riches, et, de l’autre, trop d’esprit pour se condamner volontairement à la pauvreté.

Suivant les uns, son histoire est celle d’un fou, suivant d’autres, celle d’un homme d’une intelligence exceptionnelle. À Nagasaki, il fut négociant ; à Sumatra, médecin ; à Manille, peintre ; à Paris, tour à tour laquais, copiste, musicien, acteur, et à Marseille, en définitive, directeur de café.

— Excellence, me dit-il, vous allez, en voyageant en France, étudier les mœurs d’un peuple sans nul doute généreux et hospitalier, franc et probe ; cependant ne vous en mettez pas moins sur vos gardes. Les fripons vous coudoieront partout. Vous allez parcourir une terre où croissent les productions les plus variées, où se pressent, sous un ciel tempéré et sain, tout ce