Page:Cortambert - Impressions d'un japonais en France, 1864.pdf/36

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

public indolent et flâneur. — L’enseigne de l’endroit avait attiré mes regards : on voyait, appendue au-dessus de la porte, une grande pancarte où était peint un grotesque mandarin chinois habillé de vêtements jaunes et avec cette suscription : Au Prince de Nanking.

À peine eus-je fait un pas dans la tabagie, que l’assemblée, composée de buveurs et de fumeurs de tous les âges, de toutes les classes et de toutes les figures, me disséqua sans ménagement de la tête aux pieds. Je n’en demandai pas moins, en français tolérable, une tasse de thé aromatisé, ce qui fit rire sottement une vingtaine de mauvais gaillards ; mais, avant même que je fusse installé, il y eut un grand émoi dans la maison, et, d’un commun accord, trois femmes s’écrièrent à l’unisson : Francœur ! Francœur ! Francœur ! Ce mot me parut d’abord inintelligible.

Je vis presque immédiatement s’approcher de moi et me saluer fort poliment en japonais un petit homme replet, aux joues fortement rosées, à la mine réjouie, aux favoris blonds roussâtres et aux yeux bleu de ciel.

Je considérai attentivement le bonhomme ; sa physionomie était vaguement gravée dans ma mémoire ; de son côté, le nouveau venu ne se lassait pas de me regarder de face, de profil et de trois quarts.

— Par Dieu ! s’écria-t-il enfin, vous êtes le docteur Kouen-fou ?