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les voies de l’amour

porter sa présence avec moins d’amertume et même par la désirer. C’est ainsi que mes lettres devinrent de plus en plus courtes et rares, faute de temps pour les rédiger.


« Pendant les premiers mois j’allais passer tous mes jours de congé à la campagne avec ma bonne petite amie. Que c’était bon et beau le matin de voir, de ma fenêtre en face du fleuve, le soleil sortir de sa couche en secouant ses draps de pourpre frangés d’or et d’argent, de contempler l’onde qu’irisaient les premiers feux de l’astre, d’entendre le pépiement des oiseaux qui s’appelaient ou chantaient le réveil de la nature, de sentir la brise fraîche qui apportait le parfum des dernières fleurs de nos jardins, de contempler l’herbe qui prenait, sous les gouttelettes de rosée, des tons d’argent brillant ou des apparences de broches serties de diamants. Que l’ombre était douce sous les tonnelles quand la cigale disait au soleil : « J’aime tes rayons bienfaisants » et que l’on entendait les petits oiseaux donner la becquée à la dernière couvée dans les nids d’à côté ! Qu’il était agréable de se promener à travers la campagne quand le ciel clouté d’étoiles éclairait les sentiers où l’on rêve d’amour ! Je n’avais jamais goûté la campagne comme en ces beaux jours. J’aurais voulu rester là toujours, et ne jamais retourner dans ma chambre d’étudiant où la vue était bornée par des bicoques dégradées, des poteaux en forme de calvaire hideux