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les voies de l’amour

mon épouse en me fiant trop à ses belles apparences. Vivant toujours avec elle, l’aimant toujours ardemment, la voyant toujours si gaie, jamais je n’aurais pu croire qu’elle fût aussi malade, et j’ai négligé de faire toutes les recherches, tous les examens qui s’imposent chez la femme enceinte, même quand elle semble ne présenter rien d’anormal, rien de particulier. Mon amour m’aveuglait, et tous les deux nous ne pensions qu’au bonheur qui se faisait trop attendre sans penser suffisamment aux accidents qu’une telle félicité pouvait cacher. Nous ne causions plus que de la naissance du petit être que nous désirions depuis si longtemps. Rien autre ne nous troublait ; nous ne rêvions qu’à lui, et les jours nous paraissaient si longs et les nuits si interminables. Nous allions gaiement notre chemin en aveugles, sans soucis des dangers qui nous menaçaient, sans crainte des précipices que nous frôlions innocemment, cachés qu’ils étaient par les milliers de fleurs variées et odorantes qui en ornaient les crêtes et en cachaient les profondeurs. Si mon exemple malheureux pouvait profiter à toutes les femmes, à tous les époux, à tous les médecins, j’en rendrais grâce au ciel, car le nombre des femmes qui meurent du fait de leur grossesse diminuerait énormément, disparaîtrait même complètement et bientôt la mortalité maternelle ne serait plus qu’un fait du passé. L’arbre, qui donnerait les fruits mûrs, serait toujours