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les voies de l’amour

jamais. Ils avaient oublié complètement que la soixantaine avait dénudé leur crâne et blanchi leur tête, et ils s’en donnaient comme autrefois dans leurs agapes d’étudiants avec la même gaminerie.


« Hé ! Baptiste, s’écria tout à coup Oscar, ne revois-tu pas ces grosses volutes de fumée grisâtre qui s’échappaient de nos pipes que nous avions bourrées dans la grande blague de ce bon Frise-Blague à la face passée au jus de tabac. J’en sens encore l’odeur nauséabonde et l’âcreté qui me gratte la gorge, et je revois le sympathique abbé Marcoux, le vice-recteur, qui, en se frottant les yeux, entr’ouvre la porte de son bureau et nous crie : « De grâce, fumez du tabac et non des feuilles de chou et de rhubarbe fermentées ; j’étouffe et les yeux me brûlent. »

Et Baptiste, pour donner plus de vie à ce souvenir, ouvre une grande bouche et entonne une de ces chansons grivoises du fameux Victor, le maître-chantre de la faculté. Cependant que Jean Bruneau, tenant de chaque main un couteau et une fourchette, bat la mesure sur la table en répétant : gauche, droite.

« Que fais-tu, lui dit Louis Vincent en le poussant du coude ; le bon vin de Michel Toinon te monte-t-il déjà à la tête ? Il t’en faut bien peu, car il me semble que tu