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Page:Coubertin - Conférence faite à la Sorbonne au Jubilé de l’U.S.F.S.A. (Manuscrit de novembre 1892).pdf/5

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un danger national. Or tous les petits Allemands d’Amérique d’Amérique professent une grande admiration pour l’Allemagne d’Europe ; bien établis sur cette terre de liberté, avec un océan entre eux et leur ancienne patrie, ils exaltent sans cesse le joug qu’ils n’ont pu supporter, prononcent orgueilleusement le nom de l’Empereur et rêvent de germaniser par la langue et par les mœurs une bonne partie du nouveau monde ou ils sont établis sans le moindre esprit de retour. Aussi ont-ils établi fondé pour leurs enfants des sociétés de gymnastique calquées sur celles du vieux pays et qui constituent une organisation tout à fait à part et homogène dans ce chaos de systèmes qu’on appelle l’athlétisme là-bas, l’Éducation physique.

Vous me direz qu’il manque à cette gymnastique ce que j’indiquais tout à l’heure comme la condition essentielle de son succès : l’idée militaire et la perspective du champ de bataille. Ne croyez pas cela, messieurs. Vous êtes portés à ne voir dans ces 69 millions d’hommeshabitants que des marchands, des commerçants, des faiseurs d’affaires. Il y a une Allemagne Amérique pensante, une Amérique scientifique et il y a aussi une Amérique militaire. Si matériellement les traces de la guerre de Sécession ont disparu, les traces morales sont encore visibles : l’ébranlement produit dans les cœurs américains par cette guerre lutte cyclopéenne s’est transmis jusqu’à nos jours et je déclare que le patriotisme du Citoyen des États Unis est l’un des plus puissants et des plus formidables que je connaisse ; on peut tout en attendre.

Tandis qu’à West Point où les traditions militaires françaises sont de tout temps toujours en honneur et où se forment [?] son corps se forme un corps d’élite celui des officiers d’élite de l’armée fédérale qui ont jusqu’ici trouvé l’emploi de leurs talents dans la guerre contre les Indiens, définitivement vaincus aujourd’hui, chaque État possède maintenant une milice qu’on aurait bien tort de confondre avec considérer comme une garde nationale sans valeur. Le temps et la compétence me manquent pour en étudier le fonctionnement mais je puis attirer votre attention sur trois faits ; le nombre des hommes enrôlés, la perfection de l’armement de l’outillage et enfin cette remarquable expérience de mobilisation qui vient de se faire en Pennsylvanie, et certes l’occasion n’était pas favorable. L’appel était imprévu et il s’agissait non point d’un de combattre des ennemis du dehors, mais de maintenir l’ordre au milieu d’une grève sanglante. En 24 heures, ces commerçants, ces faiseurs