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dont il s’empara. Lui et ses guerriers restèrent toujours isolés au milieu de la population italienne. « Leur gouvernement, dit M. Martroye, fut celui d’une armée d’occupation. Les lois romaines restèrent en vigueur, le sénat romain continua de subsister, entouré de respect mais sa compétence réduite aux affaires municipales. » Quant à l’Église, Odoacre qui se réclamait d’Arius ne manqua point de chercher à la mettre en tutelle. Le pontife Simplice étant mort en 483, il intervint dans l’élection de son successeur Félix iii qu’il savait devoir être plus indulgent à l’arianisme.

En 487 Odoacre ayant eu l’imprudence de s’attaquer aux Ruges, peuplade des rives du Danube dont les déprédations s’exerçaient souvent aux dépens de la Dalmatie, le chef des Ruges invoqua le secours de son parent Théodoric, roi des Ostrogoths. Théodoric avait passé une partie de son enfance à Byzance ; il y avait été envoyé comme otage à huit ans ; il y avait sans doute appris beaucoup de choses mais non l’écriture. Toute sa vie, il y resta rebelle ; il signait les actes publics au moyen d’une plaque d’or ajourée dont sa plume barbare suivait les contours. Guerrier avant tout, il méprisait tout autre métier que celui des armes. Chef de son peuple depuis 472, il était pour l’empire un voisin peu désirable. À plusieurs reprises, il avait dévasté les frontières et même la Macédoine et la Thessalie ; il occupait de façon permanente la Mésie et la Dacie (Bulgarie et Roumanie actuelles). Zénon qui le craignait et lui avait, pour l’amadouer, conféré le titre de consul, n’aperçut que des avantages à le voir entrer en conflit avec Odoacre. Il l’encouragea donc à descendre en Italie, de sorte qu’à l’automne de 488, Théodoric ayant mobilisé toutes les tribus qui reconnaissaient son autorité, une masse humaine accompagnée d’immenses convois roula vers la péninsule. C’était cette fois[1] une véritable migration ; on partait sans esprit de retour. Odoacre vaincu à Aquilée, perdit Vérone et alla s’enfermer dans Ravenne où il résista deux années. En 493 l’autorité de Théodoric s’étendit sur la plus grande partie de l’Italie. Il se garda de modifier la ligne politique qui avait si bien réussi à son prédécesseur, en rétablissant l’empire d’Occident ou en se déclarant indépendant de l’empire d’Orient. À défaut d’un sens gouvernemental très éveillé, il sut se confier à deux hommes qui allaient

  1. On estime à moins de deux cent mille le nombre de Wisigoths qui passèrent en Gaule et en Espagne. En Afrique les Vandales furent à peine cinquante mille. Les barbares qui s’établirent à plusieurs reprises en Italie furent bien plus nombreux.