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l’hellénisme

avant tout rendre la liberté aux villes grecques d’Asie-mineure, il suivit la côte parallèlement avec sa flotte. Au-dessus de Sardes, il entreprit la construction d’un temple dédié à Jupiter Olympien. Près d’Issus, au sortir du défilé des Portes ciliciennes par où jadis avait passé Cyrus, il mit en déroute l’immense armée de Darius III. Il fonda alors Alexandrette et se dirigea sur la Phénicie, l’antique rivale et ennemie de la Grèce. Il s’acharna sept mois durant au siège de Tyr (332) et le dépit d’une si belle résistance le rendit cruel au point qu’une tache en subsiste à sa mémoire. La Palestine et l’Égypte se soumirent. Alexandre, redevenu maître de lui, honora les Égyptiens et leur culte. Il créa Alexandrie et visita l’oasis d’Ammon sise dans le désert fort loin du rivage de la mer et de la vallée du Nil, vers l’ouest. Il tenait à cette difficile excursion parce que Cambyse n’avait pu la faire : on reconnaît là ses vingt-cinq ans. Mais tout aussitôt, un problème se posa qui réclamait l’expérience et l’intuition d’un grand politique. Darius offrait de céder toute l’Asie-mineure jusqu’à l’Halys. Les lieutenants d’Alexandre penchaient pour l’acceptation. Il ne se laissa pas convaincre et la victoire lui donna raison. Le 1er octobre 331, dans la plaine d’Arbèles, à l’est des ruines de Ninive, ses quarante mille hommes l’emportèrent sur l’armée près de vingt fois supérieure en nombre qu’avait levée le roi de Perse. Babylone, Suse et Persépolis se rendirent et leurs trésors furent remis à celui qui avait quitté son petit royaume emportant quelque soixante talents (environ 350.000 francs) et endetté par les préparatifs de son expédition d’une somme beaucoup plus forte. Ses conquêtes lui valaient aujourd’hui la possession de 170.000 talents, c’est-à-dire tout près d’un milliard. Darius III s’était enfui vers le nord. Alexandre prenant la tête d’un raid de cavalerie d’une rare audace, parcourut quarante-cinq milles (soixante douze kilomètres) en une nuit mais il n’atteignit qu’un cadavre ; le souverain déchu venait d’être assassiné par un de ses satrapes. Alexandre ayant fait rendre les honneurs royaux à sa dépouille, assuma le titre de « Grand roi » que portaient les rois de Perse : une sorte de synonyme oriental du titre impérial des futurs souverains d’occident. Puis, il eut la grande sagesse de confirmer tous les gouverneurs perses dans leurs fonctions et la grande habileté de gagner par sa magnanimité et sa générosité la sympathie des vaincus. D’Hécatompyle où il séjourna au milieu de fêtes magnifiques, Alexandre signa un décret fameux (330) par lequel il supprimait tous les gouverneurs autoritaires qui se trouvaient dominer dans certains États