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histoire universelle

de Grèce, rendant ainsi à toutes les cités de son pays la pleine liberté de leurs institutions municipales. Il y avait à agir ainsi bien de l’audace et quelque imprudence car cette manière d’unification s’opérait en somme au nom d’un pouvoir que tous en Grèce ne reconnaissaient point. L’invitation à proclamer partout des amnisties ressemblait fort à une injonction. La lecture faite durant les Jeux olympiques de semblables messages n’était point propre à faciliter la tâche du vice-roi de Macédoine, Antipater, auquel Alexandre en partant avait confié la régence. Entre eux point de communications rapides. Les Hellènes pouvaient se croire abandonnés au profit de l’Asie ; des victoires si lointaines ne les touchaient plus.

Ayant repris sa marche, Alexandre se dirigea vers la Bactriane, fondant en route Hérat et Kandahar (330) ; puis il soumit la Sogdiane, fonda Samarcande et « Alexandrie l’extrême » (Chodjend). Pendant l’hiver de 328-27, il tint sa cour à Zariaspa nouant des relations avec les barbares qui gardaient les routes du Thibet et faisant en même temps représenter par des artistes grecs qu’il avait mandés près de lui des tragédies classiques. Il s’attarda fâcheusement dans ses parages pendant l’année 326 en guerres inutiles et dures. Ayant pris Lahore, il prétendit descendre le Gange. La révolte de ses troupes l’arrêta. Alors il descendit l’Hyphase puis l’Indus. L’armée revint par terre tandis que la flotte, sous la conduite de Néarque, suivait le littoral pour l’explorer.

D’où venait cette flotte ? Quand et comment avait-elle était construite ? Nous ne le savons qu’imparfaitement mais il est à peine besoin d’insister sur les difficultés prodigieuses qui furent surmontées au cours de toute cette campagne. Avec le minimum de batailles, le maximum de résultats. Les effectifs toujours au point, le passé et l’avenir toujours ménagés, partout des villes nouvelles si bien situées que la plupart vivent encore, partout des administrations si ingénieuses que les populations y trouvaient de l’allègement au lieu de servitude. De son quartier général ambulant, Alexandre gouvernait l’empire, veillant à tout ; seule, la Grèce était trop loin, trop en dehors de son rayon présent pour qu’il pût agir directement sur elle. Mais la pensée grecque ne l’abandonnait aucunement. Il gardait le culte de la Raison supérieure et de l’équilibre humain. Son État-major était un vrai ministère : des géographes et topographes, des explorateurs, des naturalistes l’accompagnaient et aussi des gens de lettres, poètes et orateurs, des artistes, des musiciens ; c’est toute la civilisation