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histoire universelle

des Ptolémées et aussi celui de Pyrrhus roi d’Épire, pays mal hellénisé mais où il devenait de tradition de se porter au secours des intérêts helléniques menacés. Assiégée de nouveau en 279 par les Carthaginois, Syracuse fut prise en 212 par les Romains après le siège fameux à l’issue duquel Archimède, tout à ses calculs et au soin de ses découvertes, reçut le coup fatal sans même songer à détourner le bras brutal qui l’assénait.

Telle fut donc la figure extérieure du monde grec pendant les deux siècles qui s’écoulèrent après la mort d’Alexandre. Quel esprit l’animait ? Quand il s’agit d’hellénisme, c’est toujours là le point essentiel. En politique, deux institutions s’opposaient désormais : le municipalisme et l’impérialisme. Alexandre avait pris aux asiatiques l’idée de la monarchie universelle et l’avait occidentalisée ; il avait été le premier européen à régner sur un vaste ensemble de peuples. Qu’il y eut des candidats à un tel poste, rien d’étonnant. Seleucus, Antiochos le grand et d’autres y visèrent sans succès. Mais de son côté, une partie de l’opinion en maints pays commençait d’évoluer et d’aspirer, confusément encore, à cette unité gouvernementale que Rome devait bientôt réaliser. D’autre part, il n’apparaissait pas nécessairement que l’existence d’un tel pouvoir central fut incompatible avec la liberté des cités. Jamais le type hellène de la cité n’avait été plus répandu. Alexandre avait fondé soixante-dix villes nouvelles et les Séleucides, environ trente-quatre. Toutes avaient reçu les institutions fondamentales de la cité grecque et ce n’était pas la présence d’une sorte de gouverneur royal, exerçant le plus souvent un contrôle assez vague, qui, au iiime et au iime siècles, en entravait le fonctionnement. Le péril pour l’hellénisme était autre. Il provenait de l’incompatibilité — absolue celle-là — qui existait entre le fonctionnarisme égyptien ou les castes spécialisées de Babylone et le principe administratif grec que « tout citoyen cultivé peut être apte à n’importe quelle fonction ». Ajoutez-y que, dans ces villes nouvelles, les unes trop populeuses et cosmopolites, les autres trop isolées, le rôle de l’agora allait s’abaissant. Le débat public y perdait de l’ampleur et de l’intérêt et cessait d’être une école de civisme. Malgré tout, la résistance de la cité et de ses rouages fut longue et tenace. Cent cinquante ans après J.-C., Séleucie avait encore ses collèges d’éphèbes et une assemblée municipale de trois cents membres et il existait à Babylone un gymnase dont on a retrouvé le palmarès.

En religion comme en politique, une tendance unitaire se