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Page:Coubertin - Histoire universelle, Tome II, 1926.djvu/80

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rome

s’enorgueillissaient de cet honneur dont l’éclat rejaillissait sur leurs enfants. Par là une forme d’inégalité en remplaçait une autre. Ce n’était aucunement l’égalité, à laquelle d’ailleurs personne n’aspirait.

Car on aurait grand tort de s’imaginer que les revendications plébéiennes visassent à la suppression de la hiérarchie. Cela n’eût été conforme ni aux tendances de l’époque ni au tempérament du peuple romain. Les plébéiens, exclus au début de toute vie publique, gênés dans leur vie privée réclamaient simplement une place dans la cité. Tenus en marge de ses institutions et comme ignorés par elle, ils prétendaient y pénétrer. Tel fut le point de départ de leurs revendications et, comme ils avaient le nombre et qu’on ne pouvait tout de même point se passer d’eux, ils eurent assez rapidement gain de cause, du moins dans le domaine politique. Il leur fallut pourtant recourir fréquemment à la grève ou à la sédition. La grève de 493 est célèbre. Tout le prolétariat se retira sur le mont Sacré ; le sénat dut parlementer et concéder l’institution du tribunat. Les tribuns, porte-paroles de la plèbe, jouirent dès lors de prérogatives grandissantes. Dès 475, ils se sentaient assez forts pour tenir tête aux consuls et censurer les actes de ceux-ci. De nouveaux comices furent créés qu’on appela « comices par tribus ». C’étaient en quelque sorte des assemblées par arrondissements qui eurent notamment pour mission d’élire les dix tribuns. Puis le peuple réclama des lois écrites car les jugements n’étaient encore rendus que d’après la coutume. Le code fameux dit des xii Tables, rédigé par les patriciens, s’inspirait surtout des intérêts de ceux-ci mais des modifications radicales ne tardèrent pas à y être introduites. La plus conséquente fut probablement celle qui, en 445, autorisa le mariage entre patriciens et plébéiens. Dans le droit romain, entièrement basé sur le culte de la famille, le mariage constituait l’acte solennel et important par excellence. La réforme de 445 peut être considérée pour les plébéiens comme une sorte de « prise de la Bastille » dont tout le reste devait découler. En effet ils furent successivement admis au consulat, aux commandements militaires, à la censure, à la préture, au pontificat. En l’an 355 un plébéien se vit confier la dictature. Puis il fut décidé que l’un des deux consuls en charge serait obligatoirement un plébéien. Maintenant ceux-ci partageaient toutes les charges jadis réservées aux patriciens tandis que les patriciens continuaient d’être exclus du tribunat. Or le tribunat étant un des postes les plus influents et par conséquent les plus