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l’europe à la fin du xve siècle

en 1319 s’employa à réaliser l’unité. Cracovie qu’il « polonisa » devint sa capitale. Le règne de Casimir III (1333-1370) fut plein de sagesse prudente et de travail fécond. L’université de Cracovie fondée par lui (le latin dominait encore l’enseignement) fut un centre d’études nationales. À sa mort l’opinion souhaita le mariage de sa fille Hedwige avec le souverain de la Lithuanie, Jagellon. L’unité lithuanienne avait été réalisée au début du xiiime siècle par un chef habile et énergique du nom de Mindvog. Entré en 1252 dans le giron romain et, couronné roi au nom du pape, il n’avait pas tardé à retourner au paganisme. Ses héritiers s’étaient emparés de Kiew qui devait demeurer quatre siècles aux mains des Lithuaniens. Ceux-ci ravageaient d’autre part les terres des Teutoniques et leur faisaient la vie dure. Après les progrès commerciaux et administratifs accomplis sous Casimir III, la couronne de Pologne était bonne à prendre mais l’épée lithuanienne était précieuse à posséder. Jagellon épousa Hedwige et, ayant embrassé le christianisme, fut sacré à Cracovie (1386). On distribua à son peuple un baptême général. Un prêtre, racontèrent les satiriques, aspergea d’eau bénite les bandes lithuaniennes qui passaient devant lui donnant à chacune en bloc, un nom d’apôtre.

L’union des deux États en faisait une des grandes puissances d’alors. Ce ne fut point du reste une union paisible et harmonieuse. Bien des querelles de ménage la troublèrent. Mais la communauté d’intérêts, de périls aussi (d’un côté le germanisme, de l’autre les Mongols) maintint le lien conjugal. L’influence polonaise d’ailleurs l’emporta et la Lithuanie finit par se trouver quasiment annexée ; ses privilèges disparurent et son individualité s’assoupit. Il est instructif d’étudier dans les atlas historiques les contours successifs de cette Pologne agrandie. Si savant qu’en soit le dessin, les cartes sont hésitantes et ne concordent guère. Où sont les frontières ? des lignes disputées et fluctuantes, malhabiles à délimiter le champ de vibration d’une âme collective qu’on n’arrivera jamais ni à définir ni à maîtriser.

De la mort de Jaroslav[1] (1054) à l’invasion mongole (1227), l’histoire russe s’était déroulée parmi les épreuves et l’instabilité. Les principautés semblaient devoir se morceler indéfiniment ;

  1. Jaroslav prince de Novgorod fils de « saint » Wladimir avait marqué de grandes ambitions extensionistes. Il avait repris la « Russie rouge » aux Polonais et tenté une expédition contre Byzance en vue de s’en emparer.