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prononcé par lui au sénat romain et dans lequel il s’expliquait sur les privilèges déjà accordés aux Celtes et sur les faveurs nouvelles que méritait leur fidélité. Un autre texte non moins suggestif a été conservé. En 69-70 pendant la période d’anarchie qui suivit à Rome la mort de Néron, une insurrection éclata dans l’est fomentée par les Germains. Spontanément des députés de toutes les cités celtes s’assemblèrent à Reims pour examiner la situation créée par la proposition de proclamer l’indépendance de la Gaule. À la presque unanimité l’assemblée qui délibérait en pleine liberté se prononça pour la fidélité à l’empire. Les révoltés furent invités à déposer les armes. C’est alors qu’un général romain, Cérialis, s’adressant à eux, insista sur la permanence de la menace germanique ainsi que sur les bienfaits du régime romain. « Les mêmes motifs de passer en Gaule subsistent toujours pour les Germains. On les verra toujours quittant leurs solitudes et leurs marécages, se jeter sur ces Gaules si fertiles pour asservir vos champs et vos personnes ». Et Cérialis ajoutait : « Nous ne vous avons imposé que les charges nécessaires au maintien de la paix. Sans armée en effet, pas de repos pour les nations ; sans solde, pas d’armée ; sans impôts pas de solde. C’est vous qui souvent commandez nos légions ; c’est vous qui gouvernez ces provinces ou les autres. Je dis plus : la vertu des bons princes vous profite comme à nous, tout éloignés que vous êtes ; les bras des mauvais ne frappent qu’autour d’eux ». Commentant ce discours fameux, C. Jullian observe qu’en effet sous des empereurs cruels ou déséquilibrés, un Caligula, un Néron, un Domitien, la Gaule continua de vivre prospère et heureuse autant que sous les règnes des meilleurs.

Après cette brève secousse, elle retrouva pour un long siècle (70-180) toute sa sérénité. Adrien et son fils adoptif Antonin dont la famille était originaire de Nîmes la visitèrent et l’embellirent. Lorsqu’après la mort de Marc Aurèle, la quiétude générale de l’empire commença d’être sérieusement troublée, les Celtes furent à plusieurs reprises livrés à leurs seules ressources. Un moment ils se trouvèrent presque séparés de Rome et ils élirent des empereurs de leur choix (258-273). Il est remarquable que ces souverains n’aient pas un instant été tentés de réaliser ou de préparer l’indépendance du pays. On a pu dire d’eux qu’ils furent « les vrais défenseurs du nom romain ». À Aurélien et à Probus qui rétablirent l’unité impériale aucune résistance ne fut opposée. Malgré la terrible épreuve des années 275 et 276 où les