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histoire universelle

des hommes et ont leur part d’influence comme leur part de labeur » Lorsque l’association devenait trop dense, un rameau s’en détachait et allait fonder une autre association basée sur les mêmes principes et qui tout en jouissant d’une complète autonomie entretenait avec celle dont elle était issue d’étroites relations. Une telle constitution sociale « excellente pour la prise de possession de terres inoccupées était absolument insuffisante dès qu’il s’agissait de faire face à des attaques suivies » ; aussi « aucune race n’a eu autant de peine à s’élever à l’idée de nation ; les Slaves n’y sont arrivés le plus souvent que sous des influences étrangères ».

Les dernières années du viime siècle avaient vu se créer dans l’ancienne Mésie des Romains un État bulgare. Trois cents ans plus tôt les Bulgares résidaient au nord de la mer Caspienne ; ils tirent leur nom, dit-on, d’une vieille ville du district de Kazan dont les ruines sont encore visibles. Une partie d’entre eux émigrèrent pour une cause inconnue. Ils stationnèrent un moment entre la Caspienne et la mer Noire. Ils paraissaient être d’origine finnoise et mêlés d’éléments asiatiques plus récents mais dans l’ensemble ils étaient déjà quelque peu slavisés. L’empire grec s’inquiéta de ce voisinage et non sans raison car des bandes de bulgares vinrent camper jusque sous les murs de Byzance. Finalement, on s’entendit avec eux et en 679, ils s’établirent là où ils sont encore, se superposant en nombre relativement restreint aux populations slaves auxquelles ils apportèrent une organisation politique qui manquait à celles-ci. Cet événement était de nature à nuire aux intérêts des Slaves du sud mais ce qui les atteignait plus gravement encore, c’était que la possession de la Hongrie parut devoir leur échapper définitivement.

La Hongrie qui, bien entendu, ne portait pas encore ce nom (les Romains l’appelaient Pannonie) semblait avoir été disposée par la nature pour faciliter aux envahisseurs asiatiques le pillage de l’Europe. Reliée à l’Asie par une véritable route des herbes tangente à la Caspienne, à la mer d’Azov et à la mer Noire, route qui se prolongeait le long du Danube jusqu’aux Portes de fer, la terre hongroise pouvait de la sorte être atteinte par les nomades sans qu’ils eussent à se préoccuper de la nourriture de leurs chevaux ni de la leur puisqu’ils étaient accoutumés à trouver dans le lait de jument une base d’alimentation. Une fois passé le défilé qui y donnait accès, ils avaient devant eux