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que par leur extraordinaire attachement au paganisme. Aussi les Allemands se sentaient-ils doublement incités à les combattre. Tout le bassin du fleuve se trouva réoccupé par ces derniers. Il ne resta plus dans la région que quelques tribus slaves isolées. Pendant ce temps les Slaves du sud sentaient s’appesantir le triple joug bulgare, magyar et germanique. Les Bulgares sous le sceptre du « tsar » Siméon (892-927) s’entraînaient à l’impérialisme. Leur chef avait des visées sur Constantinople et venait, en attendant, de se constituer — aux dépens des Serbes principalement, — un royaume considérable mais tout artificiel. C’était un lettré. Du moins s’en donnait-il les apparences. On l’appelait le « demi-grec ». Sa cour était brillante. Un mouvement littéraire assez complet mais, dit Hilferding, « factice et peu sérieux » s’y développait. Tout cela fut éphémère. Sous son fils Pierre (927-968) qui ne sut pas se tenir en équilibre entre les Bulgares, les Russes et les Hongrois, l’hérésie des Bogomiles[1] détermina une guerre religieuse dans laquelle s’effritèrent les forces de la monarchie naissante si bien que dès 971 la Bulgarie danubienne était retombée au pouvoir des empereurs grecs.

Plus solide apparaissait l’édifice hongrois. Geza, petit-fils d’Arpad qui, converti au christianisme sacrifiait néanmoins aux idoles parce que, disait-il, il se trouvait « assez riche pour honorer plusieurs divinités » fut le père d’Étienne, véritable fondateur de la nation hongroise, homme d’une haute valeur (995-1038) que plus tard l’Église canonisa et auquel, en attendant, le pape Silvestre II donna le titre héréditaire de roi apostolique. Étienne, marié à la sœur du duc de Bavière entendait vivre en bonne intelligence avec ses voisins allemands mais s’était gardé de les prendre pour intermédiaires dans ses rapports avec la papauté. Les Allemands, eux, gagnaient du terrain sur les Slaves du sud par la pénétration agricole. En Slovénie, leurs colonies se multipliaient ; il y en avait jusqu’au delà de Vienne.

Ainsi, sous tous ces maîtres, se trouvaient des Slaves en

  1. Cette secte se maintint en Bulgarie pendant tout le moyen-âge et il est certain que bien des sectes russes lui furent apparentées. Elle était antisociale, condamnant le mariage et en général les institutions humaines. Elle groupa beaucoup d’illuminés, de mystiques et de fous. D’après elle Dieu avait eu un premier fils qui révolté, était devenu Satan. De là la tendance à voir en tout être matériel une créature de l’Esprit du mal.