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histoire universelle

Tout cela aboutit à refaire l’alliance anglo-allemande. Henri VIII s’était désintéressé des affaires continentales, occupé qu’il était à jouer les Barbe-bleue, épousant six femmes pour les répudier ou les faire mourir presque aussitôt, suppliciant tous ceux qui venaient à lui déplaire, confisquant les biens de ses victimes ou ceux des monastères, des hôpitaux, des universités, instituant enfin une église nationale sur le caractère de laquelle nous aurons à revenir. L’Angleterre tremblait, apeurée, devant cet ogre. Du moins demeurait-il en son île. Un retour offensif se produisit. Le règne de François Ier va se terminer comme il avait commencé. Les impériaux envahissent la France, s’emparent de St-Dizier, d’Épernay, de Château Thierry cependant que les Anglais prennent Boulogne et qu’en Italie une brillante victoire des Français, celle de Cérisoles, ne rapporte qu’une gloire inutile (1544) ; après quoi on traite sur la base du statu quo.

Inutile, c’est le mot qui résume tout. Jamais peut-être règnes simultanés n’ont, en trente ans, gaspillé autant de forces. Si quelques progrès agricoles ou industriels ont été réalisés, si quelques relations commerciales nouvelles se sont nouées, c’est l’activité populaire qui en a le mérite. Pendant que les rois se battaient pour des chimères, les peuples se sont efforcés tant bien que mal vers la modeste amélioration de l’existence quotidienne. La dépense d’argent a été générale. Charles-Quint a grandement appauvri ses sujets espagnols sans enrichir pour cela les Italiens ni les Allemands. Du moins pouvait-il escompter l’or américain dont le flot commençait à couler. De François Ier on a dit qu’il était « toujours à court d’une année de revenus » et c’est trop peu dire. Quant à Henri VIII s’il a dilapidé le trésor légué par son père, il se trouve avoir créé sur une base solide quoique peu morale une nouvelle « gentry » de laquelle à l’avenir les gouvernements conservateurs utiliseront fréquemment l’appui. En effet, toutes les fortunes monastiques qu’il a confisquées et qui, on doit le reconnaître, étaient médiocrement employées et ne rapportaient guère à l’État, il les a réparties en petits patrimoines dont il a gratifié sa bourgeoisie l’attachant ainsi au trône par le lien toujours très solide d’un méfait perpétré en commun.

De résultats politiques il n’y a point à proprement parler.