de l’Europe, trop incertaine. On n’avait pas prévu, au début, ce qu’allait devenir le conflit ; on avait encore moins prévu avec quelle incroyable indifférence les puissances le regarderaient se dérouler. « Ni veto, ni mandat », avait dit M. de Bismarck, et ce mot d’ordre s’exécutait au pied de la lettre. Pour s’être trop approchée de Constantinople, la Russie, quelques années plus tôt, avait soulevé les protestations de tous ; cette fois l’Angleterre jetait ses régiments sur les bords du Nil, et nulle réclamation ne se faisait entendre.
Dans la nuit du 19 au 20 août 1882, sir (depuis lord) Wolseley, commandant en chef des forces britanniques, occupa Pord-Saïd et Ismaïlia, ferma le canal, pour débarquer ses troupes, puis le rouvrit à la circulation, annonçant l’intention de payer le transit en manière d’indemnité. Si ce coup de force eût été suivi d’une prompte marche en avant, les Anglais n’eussent pas rencontré à Ramsès et à Gassanin une résistance assez sérieuse à laquelle le temps perdu à former les convois permit de s’organiser. Le 23 septembre, la bataille de Tel-el-Kébir leur ouvrit l’accès du Caire, et, dès le 17, lord Dufferin informa la Porte qu’il était désormais inutile d’envoyer des troupes ; en même temps, l’Angleterre donna à entendre que le condominium avait cessé d’exister[1]. La France
- ↑ Au Caire, un acte de comédie termina le drame. Arabi fut traduit devant la justice ; il était difficile de ne pas le condamner à mort. Les Anglais s’entremirent, prirent soin de sa personne et l’installèrent à Ceylan. Ils parvinrent en même temps à soustraire tous ses complices au jugement de la cour martiale. Cette conduite équivoque donna à penser qu’Arabi avait trahi et qu’une convention secrète avait été passée entre lui et l’Angleterre. Parmi les Anglais, ce fut une plaisanterie courante de dire que
militaire française, et encore à la séance du 11 mai suivant lorsqu’il fut question du prétendu complot contre Arabi.