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la crise (1885-1889).

monde entier souffrait depuis 1882, en était un autre. Grèves aux États-Unis, jacquerie moderne dans le bassin minier de Charleroi, troubles en Angleterre, semblaient présager une révolution sociale. En France, la grève de Decazeville avait été ensanglantée par l’assassinat du représentant de la Compagnie des mines, M. Watrin, et l’acte en lui-même terrifiait moins l’opinion que les scènes sauvages au milieu desquelles il s’était accompli. Et malgré cela le pays, loin de se désaffectionner de la République, comme il avait paru au moment des élections, lui revenait peu à peu[1]. L’on sentait que le courant réactionnaire de 1885 était arrêté déjà ; le fait devint certain lors du renouvellement de la moitié des conseillers généraux (août 1886) : les assemblées départementales se tenant, de par la loi, hors de la politique, le suffrage universel pouvait désigner des conservateurs sans qu’il en résultât d’ébranlement constitutionnel. Pourtant, les résultats furent plutôt favorables au parti républicain[2]. La chose avait d’autant plus d’intérêt que ces élections se faisaient au moment où venait d’avoir lieu l’expulsion intempestive des princes. Rien ne prouvait mieux à quel point le pays, désormais, demeure étranger aux agitations dynastiques.

En cette affaire, le gouvernement agit avec imprudence et légèreté ; au début de son ministère, M. de Freycinet avait repoussé de lui-même la loi d’expulsion que les radi-

  1. Le 14 février, l’Ardèche, la Corse, les Landes, la Lozère, élirent des députés républicains.
  2. Sur 1,434 conseillers sortants, on comptait 1,002 républicains et 432 conservateurs ; le serutin donna la victoire à 987 républicains et à 449 conservateurs. C’était, pour les premiers, uue perte de quinze sièges seulement (deux nouveaux cantons avaient été créés).