ment : on cria à l’injustice. C’était là une symptôme grave entre tous. L’armée, par la voix de ses chefs les plus autorisés, proclamait qu’un officier supérieur avait failli à ses devoirs ; elle le rejetait comme indigne, et l’on hésitait à ratifier le verdict !
Peu de jours après, un vote d’urgence sur la revision de la constitution dont, au fond, personne ne se souciait sérieusement, renversa le cabinet ; les radicaux arrivèrent au pouvoir, comme pour suivre de plus près, par une ironie du sort, l’aboutissement de leur œuvre de désorganisation et rendre évidente l’incapacité gouvernementale à laquelle les condamnaient leurs théories aussi bien que les circonstances[1]. Pendant ce temps une agglomération d’aventuriers politiques se formait autour du « Comité de la rue de Sèze », attendant des faveurs et des places, et la « jeunesse conservatrice » arborait l’œillet rouge, symbole de ses tendances dictatoriales. Il était de bon goût d’être boulangiste : dans les salons parisiens, le général recueillait des sourires et aussi — on l’apprit plus tard — des subsides pour sa cause. Le regard impénétrable, l’allure paisible comme un homme qui ne se sent pas inférieur à sa destinée, si grande soit-elle, il se mouvait à l’aise au milieu du parti le plus bizarre qui fût jamais réuni autour d’un homme politique.
- ↑ M. Floquet devint président du conseil et choisit pour collaborateurs MM. de Freycinet (guerre), Goblet (affaires étrangères), Ferrouillat, l’amiral Krantz, Peytral, Deluns-Montaud, Viette, Lockroy, Pierre Legrand. Peu de temps avant, l’ambassadeur de Russie avait enfin été autorisé par son gouvernement à entretenir des relations avec le président de la Chambre, lequel, de ce jour, fut considéré comme ministrable. On sait que, dans sa jeunesse, M. Floquet s’était laissé aller à prononcer un jour des paroles injurieuses pour le tsar Alexandre sur le passage de ce souverain, hôte de Napoléon iii.