Page:Coubertin - L Evolution Francaise sous la Troisième République, 1896.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
4
les premières années

citoyens qui paisiblement s’acheminaient le long des quais vers le palais municipal.

L’embarras de ceux que les circonstances poussaient de la sorte au pouvoir était grand. Ils avaient conscience de leur terrible responsabilité et ne l’acceptaient point le cœur léger. Ils étaient, de plus, dans la nécessité d’opposer une énergique résistance aux « impatients », comme ils les appelaient par euphémisme, à ces hommes de désordre dont ils avaient obtenu les suffrages, mais dont ils ne partageaient pas les passions violentes. À l’Hôtel de ville se trouvaient déjà Millière et Delescluze, pressés d’entreprendre une croisade révolutionnaire. La Commune était en germe dans certains quartiers de Paris ; le 18 mars aurait pu servir de lendemain au 4 septembre ; il n’y avait pas à tergiverser. La députation de Paris se constitua en « gouvernement de la Défense nationale[1] ». En faisaient partie : MM. Emmanuel Arago, Crémieux, Jules Favre, Jules Ferry, Gambetta, Garnier-Pagès, Glais-Bizoin, Pelletan, Ernest Picard, Jules Simon et Henri Rochefort. Le général Trochu fut appelé à la présidence du gouvernement. M. Étienne Arago fut nommé maire de Paris[2].

Une double tâche s’imposait aux nouveaux gouvernants : organiser à l’intérieur la défense en faisant appel à toutes les bonnes volontés ; solliciter, à l’extérieur, l’intervention des puissances européennes. « Entourez-vous, écrivait

  1. Journal officiel de la République française du 5 septembre 1870
  2. La présence de Rochefort, que l’on avait été chercher dans sa prison, n’impliquait pas de la part de ses collègues des tendances radicales. Rochefort était député de Paris, et ce titre donnait une apparence de légalité au gouvernement formé par la réunion de ceux qui le portaient. Plusieurs des modérés, d’ailleurs, qui craignaient le talent et l’influence de Rochefort, estimaient préférable de l’avoir « dedans que dehors ».