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de la république.

Gambetta aux préfets, le 5 septembre, de citoyens animés, comme vous-mêmes, du désir immense de sauver la patrie. Appliquez-vous surtout à gagner le concours de toutes les volontés, afin que, dans un unanime effort, la France doive son salut au patriotisme de ses enfants. » Et, quelques jours plus tard, Jules Favre, adressant une circulaire à nos représentants à l’étranger, les pressait de dégager, aux yeux des souverains près desquels ils étaient accrédités, la responsabilité de la France. « Il n’y a pas un homme sincère en Europe, disait-il[1], qui puisse affirmer que, librement consultée, la France eût fait la guerre à la Prusse. »

La proclamation de la République avait excité, en province, un vif enthousiasme ; un grand nombre de Français, émus par les souvenirs de 1792 et incapables, en cet instant tragique, de mesurer la différence entre les deux époques, en attendirent une sorte de miraculeux réveil et s’imaginèrent que des forces imprévues allaient jaillir du sol pour repousser l’ennemi. Ils sentaient l’âme de la nation sortir de sa léthargie et répétaient avec le Strozzi de Lorenzacchio : « Quand la République ne serait qu’un mot, ce mot est quelque chose, puisque les peuples se lèvent quand il traverse l’air. »

Les événements parurent un instant justifier ce fol espoir. Gambetta s’annonçait comme un second organisateur de la victoire ; à l’appel de sa voix qui, rarement par la suite, trouva de plus nobles accents, la confiance remontait dans les âmes et la haine contre l’envahisseur rapprochait tous

  1. Circulaire du 17 septembre 1870.