Page:Coubertin - L Evolution Francaise sous la Troisième République, 1896.djvu/403

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
382
les idées et les mœurs.

visées d’un grand nombre de leurs écrivains, n’est-il pas le fait d’une réaction. C’est le résultat direct de la diffusion de la méthode scientifique. On a coutume de dire que la science a fait, depuis un siècle, de merveilleux progrès. La chose est indéniable, mais ce qui a modifié entièrement les conditions dans lesquelles s’exercent les facultés de l’esprit humain et lui a ouvert des perspectives indéfinies, ce ne sont pas les faits, c’est la méthode ; ce ne sont pas les résultats, c’est le procédé. Les hommes ont appris que, si l’imagination crée parfois la beauté, la critique seule conduit à la vérité. L’analyse et la synthèse ont été appliquées à tous les ordres de phénomènes, et, tandis que se multipliaient les découvertes dans l’ordre naturel, on a utilisé dans l’ordre social des sources précieuses d’informations demeurées jusque-là improductives, en sorte que le passé s’est éclairci en même temps que le présent. Rapprochez le Discours sur l’histoire universelle de Bossuet et la Cité antique de Fustel de Coulanges. Ces livres paraissent avoir été écrits par des êtres d’essence différente dont le cerveau ne serait point conformé de même. L’examen, la discussion, la comparaison des textes, l’étude de la valeur exacte des mots, la précision du raisonnement, la rigidité des déductions sont les voies par lesquelles désormais on tend à la certitude.

Cette révolution dans le fonctionnement de la pensée est à coup sûr la caractéristique du dix-neuvième siècle. Elle s’est opérée en majeure partie en dehors de la France et presque à son insu. Bercés par des mirages trompeurs et satisfaits par les productions faciles de leur imagination luxuriante, les Français ont ignoré, jusqu’aux approches de