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mémoires olympiques

Un long délai était donné pour étudier et motiver les réponses. Rien donc ne fut bâclé. Ce fut l’année suivante, à notre session tenue à Luxembourg (juin 1910) que nos collègues nous rendirent compte des documents reçus par eux. Hélas ! les réponses étaient follement contradictoires. Ni dans le même pays d’un sport à l’autre, ni dans des pays différents pour le même sport, on ne semblait proche d’une entente quelconque. Des affirmations ; point d’arguments. De la fantaisie ; rien de vraiment réfléchi. À faire cette constatation, j’appréciai rétrospectivement la timidité des collègues qui avaient craint d’« oser ». Peut-être nous avaient-ils épargné par là bien des ennuis. Mais dès lors les problèmes amateuristes perdirent pour moi le peu d’intérêt qu’ils gardaient encore. Je me repliai sur ma conviction que professeur et professionnel ne doivent pas être mis sur le même pied, que le serment, non de parade, mais détaillé et signé, est la seule manière d’être éclairé sur le passé sportif d’un homme car un faux serment en ce cas le disqualifie à jamais et dans tous les domaines, que les distinctions de castes ne doivent jouer aucun rôle en sport, que les temps ne sont plus où l’on peut demander aux athlètes de payer voyages et séjours, que la qualité d’amateur n’a rien à voir avec les règlements administratifs d’un groupement sportif quelconque, etc., etc., etc., qu’aussi bien il y a beaucoup de faux amateurs qu’on doit poursuivre et beaucoup de faux professionnels qu’il faut indulgencier, etc., etc., etc.

Que viens-je d’écrire ! Quels blasphèmes ! Je devrais dire comme le curé d’Alphonse Daudet, arrêté net au milieu de sa chanson à boire : « Miséricorde ! si mes paroissiens m’entendaient ! »