Page:Coubertin - Mémoires olympiques, 1931.djvu/130

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
132
mémoires olympiques

contraire les philosophes et les pédagogues et commencer si possible d’y intéresser les sportifs eux-mêmes. Ce fut — ô paradoxe ! — un médecin qui m’y aida, un vieil ami de mes beaux-parents, le docteur Morax, alors directeur du Service sanitaire Vaudois. Ses trois fils ont marqué dans les arts, les lettres et les sciences. Il menait à Morges une existence patriarcale agrémentée par tous les réflexes de la vie générale. Rien ne se passait en Europe ni au delà qui ne trouvât un écho sympathique judicieux et équilibré chez ce vieillard entouré de jeunesse et ami des initiatives les plus osées. Il prit tout de suite au Congrès un intérêt chaleureux, saisissant à demi-mot mes arrières-pensées et les motifs secrets de son opportunité olympique aussi bien qu’helvétique. Par lui, je gagnai la collaboration d’un professeur de l’Université, M. Millioud, — dont Benito Mussolini, alors dans l’ombre où il luttait courageusement contre le destin adverse, se souvient d’avoir suivi les cours, — celle du recteur, M. de Felice, du directeur d’une école privée renommée, M. Auckenthaler… Ainsi se créa l’équipe initiale. Je m’assurai pour prononcer le discours d’ouverture un historien-philosophe de marque, Guglielmo Ferrero, ainsi que l’envoi d’une communication écrite de Théodore Roosevelt. Après cela, je ne me faisais guère illusion sur les discussions qui allaient s’ouvrir. Les sujets indiqués étaient trop inhabituels, ils demeuraient trop étrangers à la plupart des congressistes pour que l’ensemble ne déraillât pas en cours de route. Mais le programme resterait, le prestige de certains noms aussi et l’originalité de la tentative finirait par capter l’attention.

Le Congrès s’ouvrit le jeudi matin 8 mai 1913. L’avant-veille et la veille s’était tenue, dans la