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mémoires olympiques

par le Comité suédois et le Comité américain au C. I. O., qui se trouvait appelé pour la première fois à exercer un arbitrage de cette nature dans un cas aussi retentissant. Ce dossier se composait de quatre pièces : une lettre de James Thorpe à Sullivan, une lettre du directeur du collège de Carlisle, en Pensylvanie, au même Sullivan, une note de Sullivan au président du C.I.O., enfin, une « déclaration » du président et du secrétaire de l’Amateur Athletic Union des États-Unis et du Comité Olympique, lesquels, ayant examiné le cas, donnaient leur opinion motivée. Après vingt ans passés, la lecture de ces documents m’a laissé sous la même impression de dignité et de loyauté parfaites qui avaient été l’impression de la première heure ; et pas seulement pour moi, mais pour tous mes collègues. Aussi ce fut sur la proposition des membres anglais présents en 1913, le duc de Somerset et le révérend Laffan, que le C. I. O., sa décision prise, adressa des félicitations aux dirigeants américains pour leur attitude « si nettement sportive » en cette circonstance. Il n’a pas manqué de gens pour dire que Thorpe était un citoyen américain d’origine indienne et qu’on l’avait, à cause de cela, plus aisément « lâché ». C’est là une calomnie. Ce « lâchage » faisait rétrograder les États-Unis sur le tableau d’honneur de 1912 de façon sensible à l’orgueil national. Des faits reprochés à Thorpe, je n’ai rien à dire. Il y avait en ce temps, aux États-Unis, bien des étudiants peu fortunés et passionnés de sport qui, l’été, entraient dans des équipes professionnelles de base-ball, et souvent sous des noms d’emprunt. Thorpe, en 1909 et 1910, l’avait fait sous son propre nom, mais sans réaliser les conséquences de sa légèreté. On ne l’avait point su, et, rentré au collège de Carlisle, il avait depuis lors été toujours