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mémoires olympiques

samment élogieux. Nulle part, en tous cas, l’idée du rétablissement des Jeux Olympiques n’éveillait la sympathie qu’il eût fallu. Seul, mon cher ami William Sloane vibrait à cette idée. À la veille de mon embarquement, il donna à l’University Club à New-York, un dîner dont il avait choisi les convives avec grand soin parmi les gens à la fois les plus ouverts au sens sportif et au sens historique. Conversation très chaleureuse, intérêt sincère, mais arrière-pensée évidente d’un insuccès certain.

Même impression encore accentuée à Londres en février 1894. Sir John Astley réunit au Sports Club des amis pour parler de mes projets, mais le nombre des acceptants se réduisit peu à peu à une poignée plutôt inerte. Cependant, le printemps s’avançait sans apporter de promesses réconfortantes. Reculer, je n’y songeais point. C’était du reste difficile, car les adhésions, sans être assez nombreuses ni assez fermes, arrivaient pourtant, et d’un peu partout, de la Nouvelle-Zélande ou de la Jamaïque, aussi bien que d’Amiens ou de Bordeaux.

Deux sources d’inquiétude : les universités ne marchaient pas. Or j’avais beaucoup compté sur leurs délégués pour corser le caractère « classique » de l’entreprise. Et puis l’Allemagne ne marchait pas non plus. Je n’y connaissais alors personne, mais je jugeais l’appui germanique indispensable en regard du britannique et du « latin », expression que j’employais encore, n’en devant que plus tard reconnaître le caractère artificiel et inexact. Muni d’une introduction quelconque, j’avais rendu visite à l’attaché militaire allemand à Paris, le fameux colonel Schwartzkoppen, qui devait, dans la suite, être si tragiquement mêlé à l’affaire Dreyfus. Sur son con-