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cier à la pratique des sports pour en bénéficier et les ennoblir ». « Ah ! La jolie phrase, répétait-il, et comme cela va bien avec le cadre choisi ! » Cadre un peu inattendu sans doute et dont la requête avait commencé par étonner Jules Claretie. Mais il s’était accoutumé à la chose et, souriant, présida l’ouverture d’une conférence à laquelle avaient été conviés presque tous les artistes et écrivains notoires. Il n’en vint qu’une soixantaine, mais ceux qui vinrent le premier jour vinrent aux séances de discussion des jours suivants et participèrent à l’élaboration du plan. Jean Richepin, Bourgault-Ducoudray, Poilpot adhéraient avec élan. Des cortèges, des masses chorales, de grandes fresques, des odes triomphales illuminaient leur imagination. D’autres adhéraient plus froidement ou simplement supputaient les difficultés. La principale tenait en deux mots : la peur du classique. Les jeunes artistes, pour qui classique et poncif demeuraient synonymes, étaient évidemment ceux dont dépendrait le succès de l’initiative. Or cette phobie les en détournait. Ajoutez-y qu’en architecture la demande n’avait pas encore formulé ses besoins, qu’en peinture les scènes sportives réclamaient plus de ligne que de couleur, c’est-à-dire le contraire des tendances régnantes, qu’en musique la foule avait tout à fait perdu l’accoutumance aux cantates de plein air, qu’en littérature les écrivains personnellement étrangers, pour la plupart, aux joies musculaires violentes étaient inaptes à les décrire pour un public encore mal averti d’ailleurs.

On aurait pu pallier dans une certaine mesure à tout cela en faisant appel aux autres nations. C’est une précaution que j’avais eu le grand tort de négliger, me bornant à des lettres d’invitation qui