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l’éducation anglaise.

gliger la formation morale qui fait l’homme. Si on exalte l’intelligence seule, on abaisse la volonté. C’est ainsi que dans les collèges anglais, sous cette liberté apparente, se cache une discipline profonde. Les professeurs ne donnent pas seulement la science, mais ils sont les représentants de la morale et du bon sens, ils apprennent à vivre.

Enfin M. Rondelet montre l’importance de la question d’argent en cette matière. On n’hésite pas en Angleterre à payer cher pour donner à une élite restreinte une éducation véritablement aristocratique. Chez nous, il n’y a pas d’éducation spéciale pour les classes riches, et, dans notre ivresse d’uniformité, nous demandons des dissertations littéraires à des enfants dont les parents manquent de pain.

M. de Coubertin répond aux observations de M. Rondelet, et donne sur l’enseignement quelques indications qui n’avaient pas pris place dans son rapport, visant spécialement l’éducation.

Si la durée des études paraît longue, cela tient au séjour dans les universités. On y reste trois ans, après avoir passé quatre années environ dans les collèges. C’est là qu’on peut pousser fort loin la culture littéraire et faire des vers grecs. Ce qui préserve les jeunes Anglais de cette réaction si commune au sortir de nos collèges, qui fait rejeter les livres, abandonner les études, et perdre les meilleures années de la jeunesse, c’est, selon M. de Coubertin, tout le système de l’éducation, reposant sur la liberté et habituant à se conduire soi-même.

Quand vers douze ans, l’enfant entre dans un collège, il doit subir un examen d’entrée qui semble assez sérieux, et montrer qu’il possède des connaissances supérieures à celles que nous possédons en France à cet âge. Dès la première ou la deuxième année il choisit une ligne d’études, ce qui permet d’approfondir certaines matières. La séparation qui s’opère entre les études scientifiques et les études classiques est relativement assez récente, et elle n’existait pas quand MM. Demogeot et Montucci ont rédigé le rapport excellent auquel M. Rondelet a fait allusion.

Les programmes tendent, comme l’a dit M. Rondelet, à permettre aux élèves d’approfondir les matières et à bien faire connaitre les livres qu’ils étudient. Mais dans les écoles, comme dans les universités, ils peuvent être modifiés facilement. C’est ainsi qu’à Cambridge on vient de supprimer l’examen oral : il est maintenu à Oxford, sans avoir une grande importance. Les établissements d’enseignement sont autonomes. Les collèges sont d’ordinaire des fondations anciennes, possédant des terres, et administrées par un conseil que composent les grands propriétaires du voisinage. C’est à eux qu’il