cela avait été en Angleterre, la création de l’association sportive scolaire autonome et libre. Là était par excellence la cellule réformatrice.
Après l’éloquence de Jules Simon et le dévouement des jeunes intéressés, la mode s’éprit de nous. Mais je n’ai jamais aimé cette personne. Excessive et capricieuse, elle détruit elle-même ses lendemains. Que peut-on édifier de durable en l’appuyant sur la mode ? C’est pour arcbouter le frêle édifice que je venais d’élever que le rétablissement des Jeux Olympiques — cette fois complètement internationalisés — m’apparut comme la seule solution opportune. À l’anglomanie d’un jour superposer l’immense prestige de l’antiquité, désarmer quelque peu, en ce luisant, l’opposition des disciples du classicisme, imposer à l’univers une formule dont la renommée a dépassé toutes les frontières ; ce cosmopolitisme grandissant et qui constituait un danger, en faire, au contraire, un rempart et une sauvegarde, c’était le seul moyen d’assurer une relative pérennité à la renaissance sportive encore à son aurore.
Pour cela, en ce siècle laïcisé, une religion était à notre disposition ; le drapeau national, symbole du moderne patriotisme montant au mât de la victoire pour récompenser l′athlète vainqueur, voilà ce qui continuerait le culte près du foyer rallumé.
Nous sommes toujours au pied du Mont Kronion, mais la nuit va venir. Les teintes ardentes du couchant s’atténuent. Dans l’azur assombri, les premières étoiles s’allument, en même temps que là-bas, sur la droite, les lumières de la petite bourgade groupée au revers de la colline où s’élève le musée. Franchissons le Cladéos et, pour rentrer, nous passerons devant le monument nouveau. Le pâle rayon de lune qui effleure le marbre frappe sur les dernières lignes de l’inscription en grec et en français que porte le monument… « En conséquence, dit cette inscription, après avoir mentionné le rétablissement des Jeux… en conséquence, la première Olympiade de l’ère moderne a été célébrée glorieusement dans le Stade restauré d’Athènes par tous les peuples de l’univers, l’an 1896 sous le règne de Georges Ier, roi des Hellènes.
Le Stade restauré d’Athènes ! Combien j’aimerais vous faire voir en projection l’état dans lequel il était en novembre 1894 (je dois être un des rares à en posséder l’image car elle ne tentait guère les acheteurs ; les talus seuls subsistaient, arrondis par l’usure, les intempéries) et puis vous le montrer sous sa triomphante parure marmoréenne, rempli d’ouvriers occupés à parachever ses gradins, ainsi que jadis au temps de Péridès. Dix-huit mois avaient suffi à la transformation du paysage. Il s’est trouvé des gens pour la blâmer, cette résurrection et pour regretter les talus informes. Ce sont les mêmes qui invectivent à Rome le monument de Victor Emmanuel, traitant de barbares ceux qui ne pensent pas comme eux et persuadés qu’ils se donnent à eux-mêmes un brevet d’artiste irréductible en s’insurgeant dès qu’on remet debout seulement une colonne écroulée.
Dans l’enceinte rétablie se sont déroulées les scènes historiques de 1896 que nul de ceux qui y ont assisté n’oubliera jamais et qui ont fait tressaillir la Grèce tout entière. C’est là que le roi Georges a prononcé le premier la parole sacramentelle : « Je proclame l’ouverture des Jeux de la 1ère Olympiade de l’ère moderne » comme d’autres souverains et chefs d’État l’ont fait depuis tous les quatre ans. C’est là que nous avons vu pénétrer pour la première fois le prestigieux cortège des athlètes groupés par nations et débouchant de cette même