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Page:Counson - Malherbe et ses sources, 1904.djvu/147

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poète érotique, et il le connaît assez pour reconnaître dans Desportes un passage où « tout est, de mot à mot, pris de la segonde élégie du premier livre de Tibulle, qui se commence : adde merum vinoque novos…[1] ». Il a lui-même pris certains traits au poète latin : il s’est notamment souvenu des vers que le cardinal de La Valette avait mille fois répétés à Voiture, et que Balzac cite encore à Chapelain[2] ; et comme Balzac, il trouve qu’il est temps d’écouter la leçon de Tibulle :

Mais aujourd’hui que mes années
Vers leur fin s’en vont terminées,
Siéroit-il bien à mes écrits
D’ennuyer les races futures
Des ridicules aventures
D’un amoureux en cheveux gris[3] ?


Il avait, auparavant, repris dans ses vers amoureux des fictions dont plus d’une remontait aux élégies latines. C’est Tibulle (ou ses disciples italiens) que Baïf traduisait pour parler des yeux de sa belle[4] où l’amour allume ses flambeaux ; et Malherbe, reprenant le même thème, qui avait, du reste, passé par deux générations de pétrarquistes français, transforme les yeux de Caliste en forge :

Amour est dans tes yeux, il y trempe ses dards[5].

  1. Commentaire sur Desportes (Malh., IV, 379)
  2. Lettre du 12 juin 1645 (citée par Moreau, éd. des Œuvres de Balzac, p. II) :

    Jam subrepet iners ætas, nec amare decebit,
    Dicere nec cano blanditias capite.

    (Tib., l. I, él. I, 71-2.)
  3. Malh., I, 210.
  4. Baïf, Diverses amours, l. II ; Tibulle, l. IV, él. II, v. 5-6.
  5. Malh., I, 132. Une foule d’exemples de la même idée se
    trouvent chez Ronsard et ses émules.