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Mais, avec une pareille traduction, il dit justement le contraire de ce qu’il veut dire[1] ; il veut dire que les meilleurs, les plus méritants, les plus beaux, sont ceux qui vivent le moins. Il faudrait que cela rimât aux roses : avec « les plus belles choses », et avec l’autre rime de jour et séjour, nous ferons) :

Mais elle étoit du monde où les plus belles choses
Font le moins de séjour ;
Et ne pouvoit Rosette être mieux que les roses
Qui ne vivent qu’un jour.

(Seconde rédaction) (Rosette[2] ! Ici je desportisais. Nous dirons qu’elle était comme une rose, qu’elle était « rose » : en répétant le verbe vivre comme le mot « rose », ce sera du meilleur effet) :

Et rose elle a vécu ce que vivent les roses.

(Mais il ne faut pas trois fois « vivre »[3] ; nous changerons le dernier vers, et nous mettrons, d’après ce qu’ont dit plusieurs poètes :

L’espace d’un matin.

C’est encore plus court, et plus fort ; mais il faut


    graphe à son Amore e Morte. — M. Allais (o. c., p. 365) regrette que Malherbe n’ait pas songé à « la croyance antique traduite par un de nos grands poètes contemporains

    Que quand on meurt si jeune on est aimé des dieux » :

    on voit qu’il avait eu l’occasion d’y penser.

  1. Malh., IV, 397.
  2. Peut-être aussi Malherbe, devenu plus sévère, n’aurait-il plus accepté la rime trop facile de jour-séjour.
  3. Voyez comment Victor Hugo, remaniant ses vers, évitait une triple répétition, et savait utiliser une répétition énergique. (P. et V. Glachant, Essai critique sur le théâtre de V. Hugo, I, p. 227, 173, 197.)