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Page:Counson - Malherbe et ses sources, 1904.djvu/51

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CHAPITRE II

Malherbe et ses relations


On est de sa province, on tient de ses amis. D’abord l’amitié — j’entends la vraie, comme eût dit Madame de La Fayette — ne s’établit qu’entre des caractères qui ont en commun certaines façons de sentir et de voir les choses. Puis, l’amitié une fois nouée, et les relations se multipliant, chaque partie déteint un peu sur l’autre et lui donne des nuances nouvelles : Racine doit beaucoup à Boileau, qui lui-même se ressent par moments du commerce de Patru ; Malherbe ne s’expliquerait pas complètement sans Du Vair et sans les hommes qu’il a fréquentés. Il est plus exact encore de dire de lui que de Victor Hugo qu’il s’est renouvelé, et il l’a fait non seulement, comme tout écrivain, par l’évolution lente de la société et du goût ambiant, mais encore par le changement de milieu, par ses voyages et séjours successifs. Il n’écrit pas en 1590 comme en 1610 ; il n’écrivait pas non plus en Normandie, dans sa jeunesse, comme en Provence, et il n’écrit pas en Provence comme il le fera à Paris : et en cela, si l’âge et le talent mûri et la réflexion ont beaucoup fait, des voisinages divers ont aussi joué un rôle.

Fils d’un magistrat qui ne bâtissait pas sans mettre à sa maison une inscription latine[1], Malherbe a fréquenté

  1. Bourrienne, Malherbe, points obscurs et nouveaux sur sa vie normande, p. 156. Reconstruisant sa maison en 1582, il y fit mettre l’inscription : larium arirorum memoriae.