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PRÉFACE

vivantes qui en dérivent. Or, le français n’est pas une langue mère, et la France n’a pas sur le globe un excédent de population lui assurant la suprématie du nombre, suprématie d’où résulte la domination souveraine exercée par les puissances à leur apogée.

À cette heure même, le chinois, l’anglais, le russe, l’allemand sont les langues les plus répandues. Nous risquons donc beaucoup de voir quelque jour tous nos ouvrages traduits. Alors, adieu les beautés de la forme ! le fond, seul immortel, demeurera intact. Les inventeurs y gagneront. Les lettrés de l’avenir, dédaignant les imitations des anciens, rechercheront avec curiosité leurs productions. L’esprit gaulois entrera en lutte avec l’esprit grec. Les idées gracieuses du fabuliste franc inspireront un autre La Fontaine. À son tour brillamment interprété il pourra revendiquer, à bon droit, le fleuron d’or pur de la couronne de son traducteur.

Est-ce à dire que tous les poètes, petits et grands, auront leur part d’immortalité ? Rien de moins sûr. Il est des originalités factices, passagères, nullement nées viables. Certains apologues sont bons seulement au moment où ils satirisent les travers d’une génération ; inapplicables aux autres, cette génération disparue, le temps creuse pour eux le gouffre de l’oubli.

Puisse ce livre avoir un meilleur sort. Je souhaite qu’il me survive. Si maints critiques futurs, sévères à mon égard, le jugent inférieur à l’œuvre de son interprète, la fable suivante que j’ai écrite en faveur