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EN CHINE

ficiles à trouver dans les boutiques ; c’est que l’éducation littéraire, purement phraséologique, les rend impropres au maniement des affaires, bien plus à toute sorte de vie pratique ; d’ailleurs le lettré (et est lettré quiconque a été candidat aux examens ou a seulement étudié pour se présenter) doit dédaigner l’argent ; on cite dans l’antiquité chinoise, aussi bien qu’en Corée, de beaux traits de désintéressement ; je doute que les lettrés d’aujourd’hui soient unanimes dans le mépris du vil métal, ils ont du moins conservé le dédain du commerce elle tiennent pour une occupation dégradante. Mais c’est là une opinion mondaine (si je puis employer ce mot en parlant de la Chine, où la société mondaine n’existe pas) ; la loi, la coutume même sont plus équitables ; il n’est pas de promotion où le fils de quelque marchand ne soit reçu bachelier pour la valeur de ses compositions ; si parfois les lettrés de race lui font sentir son infériorité originelle, comme les journaux en relataient récemment un exemple au Ngan-Iou-fou (Ilou-pei), le fait est rare et on le remarque. La classe commerçante, par ses origines et par ses issues, touche donc à toutes les classes de la société et communique librement avec elles, elle n’est plus une caste, et depuis longtemps ; ce qui distingue les hommes en Chine, c’est le genre de vie, le métier, la fortune, ce n’est pas la naissance.

Le jeune apprenti, présenté par son père ou par des répondants, est désormais dans la main du patron. Pendant ses trois ans d’apprentissage, habillé par sa famille qu’il voit rarement, il vit dans la boutique, y est nourri et y couche ; le patron doit le soigner s’il tombe malade, mais il a toute autorité sur lui, une autorité paternelle, avec presque autant d’étendue que celle même du père chinois : il n’est pas inquiété, si le jeune homme désobéissant meurt