Page:Courant - La vie politique en Extrême-Orient, 1903.pdf/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
848
ANNALES DES SCIENCES POLITIQUES.

échoua piteusement devant l’impossibilité de transcrire toute l’ancienne littérature, et peut-être plus encore la langue écrite moderne ou les homophones chinois (mots de même son) se présentent de plus en plus nombreux. Les Japonais ne voulurent ni rejeter tout leur passé littéraire, ni renoncer aux mots chinois pour former les mots nouveaux suivant le besoin quotidien. Aujourd’hui le Mombouchô (ministère de l’instruction publique) vient de prescrire diverses réformes : limitation du nombre des caractères chinois autorisés, simplification de l’écriture syllabique, adoption d’un système uniforme de romanisation. Cette mesure peut sembler discrète et peut-être est elle appellé à plus de succès que les efforts du Romaji-kwai, mais le résultat n’en serait pas moins une rupture avec le passé, une modification de la langue : même au Japon, pareille révolution peut-elle se faire par décret ? Pour être technique la question n’en a pas moins d’importance : les Japonais vont-ils s’européaniser encore davantage ? conserveront-ils cette position mitoyenne entre la Chine et l’Europe et qui fait leur force en Extrême-Orient ?

Grands dignitaires. — Le prince de Komatsou, de la maison impériale, est mort le 18 février 1903. Ne en 1816, il fut à douze ans abbé d’une importante bonzerie Ninnazi. En 1867, il demanda sans succès l’autorisation de voyager à l’étranger : l’année suivante, il commanda avec distinction contre les troupes chôgounales. En 1871, il vint en Europe, premier prince japonais autorisé a quitter l’Empire : l’année suivante il fut rappelé par la mort de son père, le prince de Housimi. En 1873, sur sa demande il abandonna ses grades militaires et se fit nommer sous-lieutenant afin de refaire son éducation de soldat. Mais des 1874, il commanda en chef contre les rebelles de Saga : il se distingua contre la révolte de Satsouma (1877) : dans la guerre de 1894-95, il eut un commandement et fut nommé chef du grand état-major a la mort du prince d’Arisougawa. Il fit encore des voyages en Europe en 1886 et 1902.

Il est impossible, dans cette courte chronique, de donner plus qu’une idée des événements de l’année en Extrême-Orient. Le choix que j’ai dû faire a été inspiré non par l’importance respective des États, mais par l’importance des faits pour le développement de chacun. Le Japon vit aujourd’hui la vie normale d’un grand pays de forme occidentale, ses principes sont fixés ; il y a donc moins à en parler que de la Chine et même de la Corée où, par les influences extérieures, par les impulsions intérieures aussi, la constitution politique, administrative, économique, sociale est mise en question.

Maurice Courant.