Page:Cournot - Essai sur les fondements de nos connaissances.djvu/118

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Nous avons traité, dans les trois précédents chapitres, des jugements probables fondés sur l’état de nos connaissances, mais en supposant que l’on ne conteste point le fond même de ces connaissances, et que la discussion porte exclusivement sur la valeur des conséquences qu’on en peut tirer. S’agissait-il, par exemple, de la probabilité que les planètes sont habitées, nous admettions comme incontestables l’existence de l’espace et des corps, et celle des planètes en particulier ; nous mettions hors de doute ce que les astronomes nous enseignent des dimensions, des formes, des distances et des mouvements de ces corps ; nous ne songions à discuter, en fait de probabilités, que celle des analogies et des inductions qui nous portent, à la suite de l’acquisition de connaissances réputées certaines, à croire que les planètes sont habitées. Maintenant, au contraire, il s’agit d’appliquer les idées fondamentales de la raison des choses, de l’ordre et du hasard (c’est-à-dire de la solidarité et de l’indépendance des causes), et les conséquences qui s’en déduisent sur la nature des probabilités et des jugements probables, à l’examen critique des sources de la connaissance humaine, ce qui est le principal objet de nos recherches, dans tout le cours de cet ouvrage. Toutes les facultés par lesquelles nous acquérons nos connaissances sont ou paraissent être sujettes à l’erreur ; les sens ont leurs illusions, la mémoire est capricieuse, l’attention sommeille, des fautes de raisonnement ou de calcul nous