Page:Cournot - Essai sur les fondements de nos connaissances.djvu/21

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autour de sa planète avec le mouvement elliptique de la planète autour du Soleil ; quoique, plus réellement encore et relativement au système d’un groupe d’étoiles dont le Soleil fait partie, la trajectoire du satellite résulte d’une combinaison des mouvements que l’on vient d’indiquer avec le mouvement, encore peu connu, du système solaire ; et ainsi de suite, sans qu’il nous soit donné d’atteindre à la réalité absolue, dans le strict sens du mot.

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Aux exemples tirés du mouvement, nous pouvons, pour éclaircir encore mieux ces notions préliminaires, en joindre d’autres fournis par les impressions qui affectent spécialement le sens de la vue. Des yeux fatigués ou malades éprouvent dans les ténèbres des impressions semblables à celles que la lumière directe ou réfléchie produit sur les yeux sains, dans des circonstances normales. On voit des étincelles, des taches obscures ou diversement colorées. L’action de l’électricité, une compression mécanique peuvent produire les mêmes effets, et donnent lieu à des sensations visuelles ou optiques du genre de celles que les physiologistes nomment subjectives, parce qu’elles ne correspondent à aucun objet extérieur qui révélerait sa présence à la manière ordinaire, en vertu de l’action spéciale exercée sur la rétine par les rayons qui en émanent. Dans des cas d’hallucination, on croit voir des spectres, des fantômes ; et alors ce n’est plus l’état maladif ou anormal de la rétine ou du nerf optique qui vicie les impressions du cerveau, c’est l’état maladif ou anormal du cerveau qui réagit sur les appareils nerveux placés dans sa dépendance, et qui en pervertit les fonctions. De pareilles aberrations de la sensibilité, qui appartiennent en quelque sorte à l’état normal, vu la fréquence et la quasi-périodicité de leur retour, produisent les songes. Tout cela n’est évidemment qu’illusion, fausse apparence, tenant sans doute à des lois manifestes ou cachées qui régissent notre propre sensibilité, mais sans liaison avec aucune réalité extérieure, ou du moins sans une liaison telle qu’il en puisse résulter pour nous une perception ou une connaissance de cette même réalité.

Un charbon incandescent, en tournant avec une rapidité suffisante, produit l’impression d’un cercle lumineux continu. On trouve dans les livres de physique une théorie des couleurs accidentelles, c’est-à-dire des teintes que semble prendre accidentellement