Page:Cournot - Essai sur les fondements de nos connaissances.djvu/476

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464 CHAPITRE XX. un pic qui surpasse en hauteur les cimes même les plus éle- vées de la portion culminante. Reste à savoir si tous ces problèmes orographiques sont du nombre de ceux qui peuvent être géométriquement définis, et qui comportent une solution technique et rigoureuse. Or, il n’en est rien ; et les formules géométriques qu’il plairait d’imaginer à cet effet auraient toutes le défaut radical d’être arbitraires, au point de s’appliquer également bien au cas où le fait d’une direction générale et constante est le plus frappant, comme à ceux où il y a plusieurs déviations successives bien marquées dans la direction générale, et comme à ceux enfin où des flexions continuelles excluent par leur irrégularité et leur amplitude toute idée d’une direction générale et domi- nante. D’ailleurs, le passage d’un cas à l’autre pouvant se faire par des nuances et des dégradations continues, la logique est visiblement inhabile à distinguer les cas extrêmes : cette distinction ne saurait résulter que d’une appréciation instinc- tive qui perd progressivement de sa netteté et de sa sûreté à mesure que l’on s’éloigne des termes extrêmes de la série ; et lors même que le fait d’une direction générale n’est pas contestable, la ligne idéale qui accuse cette direction n’est pas une ligne scientifiquement définie ; l’orientation de la chaîne n’est pas un angle qu’on puisse assigner avec tel degré voulu d’approximation, ou dont la détermination ne soit affectée que des erreurs inhérentes à toute opération de mesure. S’il plaît de tracer eflectivement la ligne sur une carte, ou de coter quelque part la valeur numérique de l’angle d’orientation, il y aura dans le choix du tracé ou de la cote quelque chose d’ar- bitraire, ou quelque chose dont on ne pourra pas rendre un compte rigoureux. Il en faut dire autant au sujet des limites où commencent et où finissent les chaînes, les massifs de montagnes, que l’on connaît aussi sous la dénomination de systèmes orographi- ques. Le plus souvent, il n’y a pas entre eux de solutions de continuité tellement tranchées, qu’on ne puisse à la rigueur les rattacher les uns aux autres par quelques-uns de leurs ra- meaux, de manière à abolir finalement les distinctions les plus naturelles ; et d’autres fois au contraire, des solutions de con- tinuité matériellement très prononcées, comme celles qui tien- draient à l’interposition d’un bras de mer, doivent être reje-