Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/153

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tré « militariste », comme il disait, vu les démarches qu’il avait faites jadis pour soustraire le jeune homme à la conscription.

La Kommandantur le laissa donc tranquille, ce qui apaisa ses craintes d’être frappé d’une amende, sinon son ressentiment d’avoir été « joué » par son fils.

Pourtant, l’évasion du conservatorien était loin de faire tort à la pâtisserie : le magasin et le salon de consommation ne désemplissaient plus depuis ce jour, malgré les dix pour cent dont Lavaert, profitant aussitôt de l’affluence, avait encore majoré le prix, déjà doublé, de tous les gâteaux. Ses deux demoiselles de magasin étaient sur les dents, et lui-même, qui n’avait pour tout aide qu’un petit gâte-pâte de quatorze ans à peine, eût succombé devant ses fours si, de temps à autre, il n’était remonté des souterrains, la toque de percale en arrière, son blanc costume maculé de taches, pour humer le frais de la boutique et éponger avec un torchon son visage cramoisi, ruisselant de sueur. Loin d’inquiéter les estomacs susceptibles, cette apparition était aussitôt saluée d’un concert de compliments, auxquels tout d’abord le défiant bonhomme ne voulut rien comprendre.

Mais peu à peu, il se laissa persuader qu’il était un père patriote et que ses récriminations n’avaient été qu’une manière de donner le change à la Kommandantur. Le soir, au Château d’Or, il devenait belliqueux et, excité par Vergust, prononçait de véritables philippiques contre les em-