Page:Courteline - Boubouroche.djvu/61

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n’ai aucunement, croyez-le, l’intention de vous provoquer, mais je quitterai cette maison quand j’aurai reçu de vous l’assurance que vous ne toucherez pas à un seul cheveu de la personne qui est là-bas. Je vous en demande votre parole d’honneur, et c’est le moindre de mes devoirs. Vous êtes extraordinaire, vous me permettrez de vous le dire, avec vos airs de me mettre à la porte d’une maison qui n’est pas la vôtre ; et, si je veux bien me rendre à vos ordres, eu égard à votre état d’exaltation, vous ne sauriez moins faire, convenez-en, que de céder à ma prière.

Boubouroche sentit venir l’instant où ça allait mal tourner. D’une voix blanche où tremblait l’excès d’une douleur capable de tout : « Je vais faire un malheur » dit-il. Mais l’autre, si crânement, lui répondit : « Faites-le ! », qu’il demeura bouche bée, désorienté devant la hardiesse généreuse de ce blanc-bec qui, avec tant d’aisance, tant de chic, tant de jeunesse, tenait tête à plus fort que lui et acceptait sans discussion le montant de la carte à payer. Ayant, encore une fois, la fierté de sa poigne moins qu’il n’en avait la méfiance,