Page:Courteline - Le Train de 8 h 47, 1890.djvu/136

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

À Lérouville, comme l’employé criait une phrase au dehors, Croquebol lui couvrit la voix :

— Tais donc ta gueule, toi, feignant !

La Guillaumette ayant constaté que l’horloge marquait exactement neuf heures, fit la blague de rendre l’appel, le litre tenu au bout du bras, à la façon d’une chandelle :

— Silence à l’appel ! Manque personne, mon lieutenant !

On repartit.

De chaque côté du wagon la campagne déserte filait. La nuit se fondait dans l’orage, tombait d’un ciel couleur de fer où s’entre-dévoraient des nuages boursouflés, pareils à des chaos de montagnes. Mais ils n’en prenaient point souci, tout à l’ivresse du départ, des premières heures de liberté. Comme si la pluie fouettant la vitre eût fouetté du même coup leur joie tonitruante, dans le reste de jour qui les baignait encore, ils s’ébattaient, faisaient les polichinelles, chantaient la Bonne Hôtesse et le Bal