Page:Courteline - Le Train de 8 h 47, 1890.djvu/324

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bord du lit de camp, la gamelle calée sur les cuisses, que Flick, déjà, rappliquait, beuglant d’étonnement et d’indignation :

— Comment, encore à bouffer ! Eh bien ! vous n’avez pas le trac ! Quand on a soixante jours de prison dans la peau ce n’est pas pour qu’on emploie le temps à s’empifrer comme des oies ? Allez, allez ! reportez-moi ces gamelles-là à la cuisine et allez vous mettre en tenue pour le peloton. Rien de bon pour la digestion comme un peu de maniement d’armes.

Et il fallait bien qu’ils s’exécutassent, quittes à engouffrer en leurs poches leurs maigres portions de viande grasse encore chaude, et à siffler leur bouillon en courant, comme ils eussent fait d’un verre de vin. L’adjudant leur donnait la chasse, traînait sa quille à trois pas derrière eux, les conduisait jusqu’à la chambre où ils faisaient une apparition d’un instant, le temps de se sangler le sabre sur les flancs, de décrocher leurs mousquetons