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Page:Courteline - Les Linottes, 1899.djvu/256

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voilà qui est bien compris : non seulement Angèle n’a pas été à moi, mais encore elle n’est pas pour moi ; c’est dur, mais enfin, c’est comme ça ; et je n’ai plus, dans ces conditions, qu’à te féliciter comme tu le mérites.

Sur quoi, voyant venir trois heures, je serrai la main de Laurianne et m’en fus retrouver Angèle qui m’attendait devant ma porte.


V

Pendant un mois, les choses continuèrent de ce train. Deux, trois, quatre fois la semaine, plus ou moins, Angèle m’arrivait sans prévenir ; nous passions la journée ensemble, après quoi je filais au journal, où souvent je trouvais Laurianne m’attendant depuis un quart d’heure en fumant des cigarettes dans la salle de rédaction. Naturellement nous rentrions dîner, puis nous achevions la soirée dans une brasserie du quartier, et tout cela n’avait rien que de très agréable. C’était une liaison en règle, à l’ennui près.

Malheureusement tout a une fin. Un jour qu’Angèle était chez moi, nous fûmes brusquement arrachés à la douceur de l’intimité par un violent coup de sonnette qui nous fit sauter comme des carpes. Angèle me souffla :

— Ne bouge pas !

Je répondis d’un simple mouvement de tête ; et nous demeurâmes immobiles, la bouche ouverte, dans l’attente d’un nouvel appel. Il y eut un instant de calme, puis, de nouveau, un carillon effroyable ébranla le silence profond de l’appartement, en même temps qu’une voix criait de l’autre côté de la porte :