Page:Courteline - Les Linottes, 1899.djvu/54

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les profits réalisés : bénéfices minuscules, c’est vrai, mais qui, multipliés au cube, eussent fini par faire des sommes.

— Eh ! dit Hamiet ; rien du tout ! le jeu n’en valait pas la chandelle. Puis, j’ai plusieurs autres idées.

Marthe eut un étrange sourire.

— Et allons donc ! s’exclama-t-elle. Le contraire m’aurait étonnée !

De même la mission d’un arbre fruitier est de porter des noix, des cerises ou des pêches, de même la mission d’Hamiet était de porter des idées, – toujours inapplicables, c’est vrai, mais toujours originales, puisées aux sources, aux seules sources, d’une imagination délicieusement absurde.

Filles timbrées d’un père qui avait reçu une fêlure, elles possédaient au plus haut degré, comme lui-même, le don précieux de faire illusion, de charmer par leur bonne grâce, de séduire par leur nouveauté, et de convaincre enfin les gens par leur ardente foi en elles autant que par leur raison d’être, étonnamment apparente. Elles sonnaient à ce point l’or comptant qu’on leur faisait crédit sur la mine, tout de suite. Seulement, priées de s’exécuter, rien de fait ! Ce n’était plus le jour. Que de millions avaient dévorés leurs quenottes, depuis une dizaine d’années qu’Hamiet infestait Paris, la province et l’étranger de son ingéniosité sans seconde !


Il est de ces blondes fiancées, aux yeux doux, aux lèvres de roses, qui, le soir venu de leurs noces et tandis que l’heureux époux se ronge les poings d’impatience, dégrafent leurs corsets, laissent tomber leurs jupes, et lèvent leurs chemises sur… une jambe de bois.